Tommaso Campanella (1568-1639) et sa « Cité du Soleil »

Tommaso Campanella est un moine dominicain et philosophe italien, né le 5 septembre 1568 à Stilo (Calabre), mort le 21 mai 1639 à Paris. Il s’intéresse principalement à la politique de son temps (monarchie espagnole régnant alors sur la Calabre intégrée au Royaume des Deux-Siciles), et développe, notamment dans son ouvrage La Cité du Soleil, des thèses de philosophie politique qui tendent vers l’utopie. Il élabore également sa propre théorie de la connaissance.

Le texte intégral de « la Cité du soleil » est en ligne ici

Quelques extraits du livre de Tommaso Campanella décrivant la Cité du Soleil :

Extrait 1 : Description de la cité.

L’Hospitalier
Comment est bâtie cette cité, et comment est-elle gouvernée ?

Le Génois.
Au milieu de la vaste plaine, dont je t’ai parlé, s’élève une immense colline sur laquelle s’échelonne la plus grande partie de la ville qui s’étend bien au-delà du pied de la montagne, car elle a un diamètre de plus de deux milles et un circuit de sept. Joins à cela, pour te faire une idée de sa grandeur, qu’à cause de la convexité de la colline, elle contient plus d’édifices que si elle était dans la plaine. La Cité est divisée en sept cercles immenses qui portent les noms des sept planètes. On va de l’un à l’autre de ces cercles par quatre rues et quatre portes qui correspondent aux quatre points cardinaux. La ville est ainsi bâtie que, si l’on s’emparait du premier cercle, il faudrait redoubler d’efforts pour se rendre maître du second, et encore plus pour le troisième, et ainsi de suite, car il faudrait la prendre sept fois pour la vaincre. Je pense, quant à moi, qu’on ne pourrait pas même forcer la première enceinte, tant elle est solide, flanquée de terre-pleins munie de toute sorte de défenses, telles que tours, bombardes et fossés.

J’entrai dans la Cité par la porte du Septentrion, qui est recouverte de fer et ainsi faite qu’on peut la lever, la baisser et la fermer solidement, grâce aux rainures habilement ménagées dans les murs massifs, et je me trouvai dans un espace de soixante-dix pieds, qui sépare la première muraille de la seconde. De là on voit d’immenses palais tous unis par le mur du second cercle, de manière à ce qu’ils paraissent ne former qu’un seul bâtiment. Du milieu de la hauteur de ces palais s’avancent de larges corniches qui font tout le tour du mur circulaire et qui servent de terrasses. Elles sont soutenues par de grandes colonnes qui forment, au-dessous des terrasses, un élégant portique semblable à un péristyle ou aux cloîtres qu’on voit dans les couvents. Les palais n’ont d’entrée inférieure qu’en dedans, du côté concave de la muraille. On pénètre de plain-pied dans le bas, et l’on monte dans de vastes galeries, toutes semblables entre elles, par des escaliers de marbre. Ces galeries communiquent avec la partie la plus élevée, qui est fort belle et percée de fenêtres du côté convexe ainsi que du côté concave. Ces étages supérieurs se distinguent par des murailles plus minces, car le mur convexe, c’est-à-dire l’extérieur, a une épaisseur de huit palmes, et le concave de trois ; les murs intérieurs n’ont qu’une palme ou une palme et demie. Ayant traversé cette enceinte, on se trouve sur une seconde esplanade plus étroite d’environ trois pieds que la première ; le premier mur du second cercle est orné de terrasses semblables. Un second mur renferme également les palais à l’intérieur. Cette enceinte a, comme l’autre, un péristyle, et les galeries où sont les portes des étages supérieurs renferment des peintures admirables. On arrive ainsi jusqu’au dernier cercle en traversant des esplanades, toutes pareilles, et de doubles murs, renfermant les palais, ornés de terrasses et de galeries soutenues par des colonnes, toujours sur un plan uni. Cependant, entre la porte extérieure et la porte intérieure de chaque enceinte, on monte quelques marches, mais elles sont faites de telle sorte qu’elles sont presque insensibles, car la pente est oblique et les degrés sont à peine séparés l’un de l’autre par leur élévation. Sur le sommet de la colline se trouve un plateau vaste et plane, et au milieu un temple admirablement construit.

L’Hospitalier
Continue, je t’en supplie, continue.

Le Génois.
Ce temple est circulaire et n’est pas entouré d’un mur, mais de fortes colonnes d’un travail exquis. Un grand dôme, qui en supporte un plus petit, s’élève soutenu par elles, et dans ce dernier on a pratiqué une ouverture qui se trouve directement au-dessus de l’autel unique placé au milieu du temple, dont la circonférence est de plus de trois cent cinquante pieds. Au-dessus des chapiteaux des colonnes avance une corniche de près de huit pieds, soutenue par un autre rang de colonnes ayant pour base un mur haut de trois pieds. Entre ce mur et les premières colonnes est une galerie dont le pavé est très-précieux. Dans la partie concave du mur, percé de larges portes, sont des sièges massifs, et entre les colonnes intérieures, qui soutiennent le temple, des sièges mobiles et gracieux. On ne voit sur l’autel qu’un vaste globe sur lequel est dépeint le firmament, et un autre globe représentant la terre. Dans l’intérieur du grand dôme on a représenté toutes les étoiles du ciel, depuis la première jusqu’à la sixième grandeur. Trois vers, écrits sous chacune d’elles, disent leurs noms et l’influence qu’elles ont chacune sur les choses terrestres. Les pôles et les cercles, grands et petits, y sont aussi peints suivant leur horizon, mais incomplètement, puisque la moitié du globe manque, le dôme n’étant qu’une demi-sphère. On peut se perfectionner dans la science par l’inspection des globes qui sont sur l’autel. Le pavé est resplendissant de pierres précieuses. Sept lampes d’or, qui portent le nom des planètes, brûlent toujours. Sur le temple, le petit dôme est entouré de petites cellules, et un grand nombre d’autres cellules, vastes et belles, habitées par quarante-neuf prêtres et religieux, sont bâties sur la plate-forme ou terrasse formée par la corniche qui entoure le temple. Au sommet de la petite coupole est une girouette très mobile qui indique jusqu’à trente-six directions des vents. C’est à l’aide de cette girouette qu’ils connaissance si l’année sera bonne ou mauvaise pour leur climat, et toutes les variations du temps sur terre et sur mer. On conserve, au-dessous de la girouette, un livre écrit avec des lettres d’or traitant de ces matières-là.

Extrait 2 : la vie quotidienne

Parle-moi, je te prie, de toutes les fonctions publiques, donne-moi à ce sujet les plus petits détails, ainsi que sur tout ce qui touche à l’éducation commune.

Le Génois.
Maisons, chambres, lits, tout, en un mot, est commun entre eux. Tous les six mois les magistrats désignent à chacun le cercle, la maison et la chambre qu’il doit occuper. Le nom de celui qui l’habite momentanément est écrit sur la porte de chaque chambre. Tous les arts mécaniques et spéculatifs sont communs aux deux sexes. Seulement, les travaux qui exigent plus de vigueur et qui se font hors des murs sont exécutés par les hommes. Ainsi, le labour, les semailles, les moissons, le battage des grains et parfois les vendanges sont faits par eux. Les femmes sont employées à traire les brebis et à faire le fromage. Elles cultivent et cueillent les fruits dans les environs de la Cité. Les arts qui n’exigent aucun déplacement sont aussi de leur ressort. Elles tissent, filent, cousent, coupent les cheveux et la barbe; elles préparent les médicaments et elles font les habits. Mais elles ne sont pas employées à travailler le bois et le fer, ni à la fabrication des armes. On leur permet de s’occuper de peinture, quand elles en ont le goût. La musique est réservée aux enfants et aux femmes, parce que leurs voix sont plus agréables. L’usage du tambour et de la trompette leur est cependant interdit. Elles préparant la nourriture et dressent les tables qui, sont servies par des jeunes filles et des garçons au-dessous de vingt ans. Chaque cercle a ses cuisines, ses greniers, ses ustensiles, ses provisions de nourriture et de liquides. Un vieillard et une vieille femme respectables président à chaque fonction et ils ont le droit de frapper ou de faire frapper les négligents et les indociles. Ils remarquent dans quelles fonctions chaque garçon et chaque fille se distingue davantage. Les jeunes gens servent tous ceux qui sont âgés de plus de quarante ans. Ce maître et cette maîtresse les conduisent le soir dans leur chambre où ils couchent seuls ou à deux, et le matin ils les envoient où leur devoir les appelle. Les jeunes gens se servent l’un l’autre, et malheur à celui qui refuserait de le faire. Il y a les premières et les secondes tables : chacune d’elles a une rangée de sièges de chaque côté ; d’un côté se mettent les hommes et de l’autre les femmes. On garde le silence, comme dans les réfectoires des couvents, et un jeune homme assis à une place plus élevée que les autres, fait à voix sonore une lecture souvent interrompue, aux passages remarquables ; par un des plus respectables membres de l’assemblée. C’est une chose bien touchante que de voir avec quelle grâce et quelle dextérité ces jeunes gens, en habits dégagés, font le service de la table ; on est ému aussi de la manière pleine d’honnêteté, de décence et d’amour qu’ont entre eux ces amis, ces frères, ces fils, ces pères et ces mères. Chacun a sa serviette, son couvert et sa portion. Les médecins sont chargés de dire aux cuisiniers les mets qui conviennent chaque jour aux vieillards, aux jeunes et aux malades. Les magistrats ont des portions plus fortes et plus délicates, et ils en donnent une partie aux enfants qui se sont distingués le matin par leur travail. Cette faveur est regardée comme un honneur très grand. Les jours de fête on chante à table, mais à une ou deux voix seulement, avec accompagnement sur la lyre. Comme chacun y met le même zèle, rien ne manque jamais au service. Des vieillards expérimentés veillent aux mets qu’on doit servir et surveillent ceux qui sont chargés des réfectoires. Ils font grand cas de la propreté des tapis, des maisons, des vases, des vêtements, des ateliers et des portiques.

Tous les habitants de la Cité portent une chemise blanche sur la peau, et sur cette chemise un vêtement qui couvre tout le corps : il est sans plis et fendu depuis le côté jusqu’au bas des reins ; on peut fermer ces fentes à l’aide de boutons. Les pieds sont couverts par une sorte de demi-cothurne serré par un lacet, et par-dessus cette chaussure ils mettent des souliers ; le tout, comme déjà nous l’avons dit, est couvert par une toge. Ces vêtements sont si bien adaptés au corps que, lorsqu’ils ôtent leur toge, on distingue parfaitement toutes les formes du corps. Ils changent quatre fois l’an de vêtements, c’est-à-dire, quand le soleil entre dans les signes du bélier, du cancer, de la balance et du capricorne. C’est l’affaire du médecin et du préposé au vestiaire de chaque cercle, de déterminer les conditions et l’opportunité de ces changements. Ce qui est remarquable, c’est que tous peuvent avoir au même moment des habillements chauds ou légers qui se trouvent prêts, dès que le besoin s’en fait sentir. Tous les habits sont blancs et lavés chaque mois à la lessive ou au savon. Le rez-de-chaussée de tous les édifices est occupé par les ateliers, les cuisines, les celliers, les greniers, les offices, les réfectoires et les lavoirs. On lave près des piliers des péristyles, et l’eau sale est conduite dans les égouts par des canaux. Sur l’esplanade, qui se trouve entre chaque cercle, sont des fontaines où l’eau arrive du bas de la montagne, à l’aide du mouvement d’une ingénieuse machine. Il y a aussi des citernes alimentées d’eau de pluie par des canaux communiquant avec les toits des maisons. Tous les Solariens se baignent souvent, selon l’ordre du médecin et du magistrat. Les arts mécaniques s’exercent sous les péristyles et les spécula­tifs, dans les galeries supérieures et sur les terrasses où se trouvent les peintures scientifiques. Dans le temple, on étudie les sciences sacrées ; dans les vestibules, il y a des horloges solaires et d’autres, et sur les tours des enceintes, des girouettes à l’aide desquelles on connaît l’heure et la direction des vents.

Extrait 3 : la procréation et l’éducation des enfants

L’Hospitalier.
Parle-moi de la génération.

Le Génois.
L’âge auquel on peut commencer à se livrer au travail de la génération est fixé, pour les femmes, à dix-neuf ans ; pour les hommes, à vingt et un ans. Cette époque est encore reculée pour les individus d’un tempérament froid, mais en revanche il est permis à plusieurs autres de voir avant cet âge quelques femmes, mais ils ne peuvent avoir de rapport qu’avec celles qui sont ou stériles ou enceintes. Cette permission leur est accordée, de crainte qu’ils ne satisfassent leurs passions par des moyens contre nature ; des maîtresses matrones et des maîtres vieillards pourvoient aux besoins charnels de ceux qu’un tempérament plus ardent stimule davantage. Les jeunes gens confient en secret leurs désirs à ces maîtres, qui savent d’ailleurs les pénétrer à la fougue que montrent les adultes dans les jeux publics. Cependant, rien ne peut se faire à cet égard sans l’autorisation du magistrat spécialement préposé à la génération, et qui est un très habile médecin dépendant immédiatement du triumvir Amour. Ceux qu’on surprend en flagrant délit de sodomie sont réprimandés et condamnés à porter pendant deux jours leurs souliers pendus au cou, comme pour dire qu’ils ont interverti les lois naturelles, et qu’ils ont mis, pour ainsi dire, les pieds à la tête. S’il y a récidive, la peine est augmentée jusqu’à ce qu’elle atteigne enfin graduellement jusqu’à la peine de mort. Mais ceux qui gardent leur chasteté jusqu’à l’âge de vingt et un ans et mieux encore de vingt-sept ans, sont honorés et célébrés par des vers, chantés à leur louange, dans les assemblées publiques.

Dans les jeux publics, hommes et femmes paraissent sans aucun vêtement, à la manière des Lacédémoniens, et les magistrats voient quels sont ceux qui, par leur conformation, doivent être plus ou moins aptes aux unions sexuelles, et dont les parties se conviennent réciproquement le mieux. C’est après s’être baignés, et seulement toutes les trois nuits qu’ils peuvent se livrer à l’acte générateur : les femmes grandes et belles ne sont unies qu’à des hommes grands et bien constitués ; les femmes qui ont de l’embonpoint sont unies à des hommes secs, et celles qui n’en ont pas sont réservées à des hommes gras, pour que leurs divers tempéraments se fondent et qu’ils produisent une face bien constituée. Le soir, les enfants viennent préparer les lits, puis vont se coucher, sur l’ordre du maître et de la maîtresse. Les générateurs ne peuvent s’unir que lorsque la digestion est faite et qu’ils ont prié Dieu. On a placé dans les chambres à coucher de belles statues d’hommes illustres, pour que les femmes les regardent et demandent au Seigneur de leur accorder une belle progéniture. L’homme et la femme dorment dans deux cellules séparées jusqu’à l’heure de l’union ; une matrone vient ouvrir les deux portes à l’instant fixé. L’astrologue et le médecin décident quelle est l’heure la plus propice; ils tâchent de trouver l’instant précis où Vénus et Mercure, placés à l’orient du soleil, sont dans une case propice à l’égard de Jupiter, de Saturne et de Mars, ou tout à fait en dehors de leur influence1.

Ils regardent comme une chose défavorable que le géniteur n’ait pas été trois jours sans voir charnellement de femme avant l’union, et qu’il ne soit pas pur de toute mauvaise action également depuis trois jours, ou que du moins il ne soit pas réconcilié avec Dieu après avoir péché. Ceux qui s’unissent sexuellement avec des femmes ou enceintes, ou stériles, ou dégradées, par plaisir ou par ordonnance de médecin, ne sont pas soumis à ces règles. Mais les magistrats, qui sont tous prêtres, et les hommes qui ne s’occupent que de science, doivent, avant de se livrer à l’acte générateur, se priver de femmes pendant un laps de temps beaucoup plus long, et se soumettre à des lois spéciales. Car le travail affaiblit chez eux les esprits vitaux, leur cerveau, sans cesse tendu par la pensée, ne transmet pas les mêmes forces génératrices, et ils ne peuvent produire qu’une race débile. Pour y remédier, on leur choisit des femmes vives, fougueuses et belles. Et par la raison contraire, on ne livre aux hommes actifs, énergiques et, pour ainsi dire, furibonds, que des femmes grasses et d’un tempérament doux.

Les Solariens pensent que les vertus fructifient en nous, grâce à une bonne complexion, et que sans elle on ne peut les acquérir. Ils ajoutent que les méchants ne font quelque bien que par crainte des lois ou de Dieu, mais que si cette crainte vient à cesser, ils font beaucoup de tort à la République, soit par de sourdes menées, soit ouvertement ; et que, pour éviter ces tristes conséquences, il faut apporter beaucoup de soin à la génération et bien pèsera cet effet les qualités naturelles, sans tenir compte de la richesse et de la noblesse de naissance qui trompent souvent.

Lorsqu’une femme n’a pas conçu par suite d’une première union chamelle, on l’unit sexuellement avec un autre homme. Si enfin elle est reconnue être stérile, elle devient commune. Mais, en ce cas, on ne lui accorde pas les honneurs dont jouissent les mères, ni dans le Conseil de la génération, ni à table, ni dans le temple ; afin de contenir, par cet exemple, les femmes qui pourraient se rendre stériles par libertinage.

Celles qui ont conçu s’abstiennent de marcher pendant quinze jours, puis, elles prennent peu à peu quelque exercice, afin de fortifier leur fœtus et de lui ouvrir les voies de la nourriture, et graduellement elles lui donnent des forces par un exercice toujours croissant. Elles ne mangent que ce qui doit leur être profitable, d’après l’avis des médecins. Après l’accouchement, elles nourrissent elles-mêmes l’enfant et l’élèvent dans des édifices communs réservés à cet usage; l’allaitement dure deux ans et plus, si le médecin le juge à propos.

Une fois l’enfant sevré, on le confie aux mains des maîtres ou des maîtresses, suivant son sexe. Les enfants sont exercés tous ensemble à connaître l’alphabet et les peintures, on les fait courir, se promener, lutter, et on leur apprend les langues et les histoires qui se déroulent en tableaux sur les murs. Ils portent dès lors de beaux vêtements. Après leur sixième année, on commence à leur enseigner les sciences naturelles ; ensuite les choses auxquelles ils paraissent le plus aptes, d’après le jugement des magistrats. Puis enfin on les initie aux sciences mécaniques. Les enfants d’un esprit plus lourd sont envoyés dans les campagnes, et si, plus tard, leur esprit s’ouvre, ils reviennent dans la Cité. Presque tous ceux qui ont été engendrés sous la même constellation ont des penchants semblables ; il en est de même pour leurs mœurs et surtout pour leurs qualités physiques. De là vient une grande concorde dans la République, car ils se soutiennent tous par leur affection mutuelle.

Les noms qu’on leur donne ne sont pas pris au hasard, mais c’est le Métaphysicien qui en impose de relatifs aux qualités extérieures, ainsi qu’on le faisait chez les anciens romains. Les Solariens s’appelleront, par exemple, le beau, le tordu, le maigre, etc. ; et lorsqu’ils se distinguent, soit dans les arts, soit dans la guerre ou la paix, on ajoute un second nom au premier, tiré cette fois de leurs actions : comme le grand, l’excellent, le fort, le rusé, le vainqueur ; ou d’une conquête : l’asiatique, l’africain, l’étrusque, etc. Ce sont les magistrats suprêmes qui décernent d’ordinaire ces noms, en les accompagnant d’une couronne qu’on remet aux plus dignes, au milieu des applaudissements et de la musique. Ils n’emploient l’or et l’argent que pour en faire des vases et des ornements dont la jouissance est commune à tous.

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